Blog

07 Oct 2016

Bérânasî dans Eulalie n°22, octobre 2016.

Pour la lenteur, on pense au film de Bernard Giraudeau Les Caprices d’un fleuve. De manière plus précise géographiquement, mais aussi plus lointaine et plus exotique, il y a le film de Jean Renoir, Le fleuve. Mais foin de références. « Le fleuve ici est une femme et s’appelle Gangâ. » Le titre Bérânasî est lui-même un motvalise entre la vision occidentale de Bénarès et le mystère de Vârânasî qui nous échappe. Ils sont six à traîner leurs bagages dans une Inde, rêvée avant le départ, et qui les rattrape au plus intime de chacun. Peu importe en vérité les personnages. Ce qui compte, c’est le fleuve qui infuse, le corps qui brûle, la trace, la blessure qui se réveille sous le scalpel de la touffeur. Bérânasî est un livre que l’on pose, que l’on dépose. On y vient, on y revient. Le livre imprèg ne. On s’y attarde comme à son corps défendant. Le voyage met à nu. Au retour, les personnages, comme le lecteur, restent à vif. « Elle fend de nouveau la foule du Leclerc [...] Elle cherche les corps, les odeurs, rien ne sent malgré la quantité colossale de denrées, la bouffe, les dizaines de morceaux de viande, les abats, les fleurs, le poisson, même le poisson ne s’autorise pas à sentir! Les fleurs encore moins ; le vide est partout! » L’ouvrage est publié aux éditions Sipayat à Aniche (Nord) qui se présentent comme une « plateforme d’édition alternative ». Avec le créateur et directeur de collection Marc Mangin, Nicolas Le Golvan partage une même vision du voyage. Une belle découverte d’écriture.

Hervé Leroy